Les 9 et 10 janvier 2025, le CMA Formation de Dinan - Aucaleuc a accueilli l’épreuve régionale de Tôlerie Carrosserie dans le cadre des Compétitions des Métiers. Sur les 11 candidates et candidats qui se sont affrontés, seul le premier se rendra à Marseille en octobre pour représenter la Bretagne lors des finales nationales. Retour sur cette journée en mettant en lumière les défis rencontrés et le parcours de ceux qui font rayonner ce métier, à l’image de Maelan, en alternance à la carrosserie Nicolas à Bégard et en bac pro au CMA de Dinan –Aucaleuc, Loan, en CDI à la carrosserie Anthony Quemener, et Marjolaine, une jeune femme qui tente de s’imposer dans un monde encore largement masculin.
Les candidats de cette édition ont dû faire face à quatre épreuves qui testaient leur maîtrise de techniques attendues. Parmi les plus complexes, le redressage d’un panneau extérieur en aluminium. Un exercice particulièrement délicat puisqu’il s’effectuait à froid, là où habituellement l’alu doit être chauffé jusqu’à 150°C pour être plus malléable.
Les candidats devaient également “faire le marbre” d’une voiture. Le marbre est un équipement utilisé pour redresser et mesurer la structure d'un véhicule endommagé après un accident. “C'est un peu refaire le squelette de la voiture.” nous explique Maelan. Le véhicule est placé sur une plateforme avec des supports et des chaînes pour appliquer une pression et remettre la carrosserie en forme. Les techniciens prennent des mesures précises qu’ils comparent aux cotes du constructeur pour vérifier que la structure est conforme. "J'ai bien aimé le module du marbre, il était vraiment sympa. Moi, je ne fais pas de marbre en entreprise." explique Loan, qui participe pour la première fois en tant que candidat libre.
En effet, Loan et Maelan nous apprennent qu’aujourd’hui, faire le marbre devient de plus en plus rare en entreprise. "Aujourd’hui il y a une personne, par exemple dans chaque département, qui sous-traite pour toutes les autres carrosseries. Et toutes les carrosseries envoient chez cette personne ou alors, le plus souvent, les voitures elles vont directement à la poubelle" explique Maelan. Les assurances prennent souvent cette décision de manière pragmatique : réparer des véhicules endommagés, notamment les châssis, revient parfois plus cher que de les remplacer. C’est dans ce contexte que les jeunes générations de carrossiers, formées aux techniques anciennes comme le marbre, doivent s’adapter aux nouvelles réalités du métier. “Le prix, ça coûte aussi, ce n'est pas forcément toujours donné. Donc, ça devient de plus en plus compliqué. Mais ça ne se perd pas et ça ne se perdra pas, ça se fait juste de plus en plus rare” complète Loan. Même si souvent, la priorité semble désormais de remplacer plutôt que de réparer, une tendance qui reflète un changement profond dans la manière dont les métiers de la carrosserie sont pratiqués.
Traditionnellement, la carrosserie est un métier de précision, alliant savoir-faire manuel et expertise technique. Dans l’atelier, le carrossier, ou la carrossière, joue un rôle crucial dans la remise en forme des véhicules après un accident, un métier souvent perçu comme exigeant. Pourtant, les évolutions technologiques et les exigences écologiques transforment petit à petit cette profession.
Aujourd'hui, les constructeurs automobiles cherchent à alléger les véhicules dans une logique écologique, afin de réduire la consommation de carburant et les émissions de CO2. Pour ce faire, ils privilégient l’utilisation de matériaux légers comme le plastique, qui est moins coûteux, mais qui ne rivalise pas avec l’aluminium en termes de solidité et de performance. L’aluminium reste l'un des meilleurs choix en raison de sa légèreté et de sa robustesse, notamment pour des pièces comme les capots et les ailes. Cependant, son coût de fabrication élevé en fait une option relativement rare, notamment pour les châssis, qui sont majoritairement faits d’acier. Des véhicules comme l’Audi TT, avec un châssis en aluminium, sont des exceptions, car la majorité des modèles utilisent l’acier pour des raisons économiques.
Parmi les candidats, Marjolaine, 19 ans, se distingue comme étant la seule fille de l’épreuve. Issue d’un parcours atypique, elle a débuté sa formation en carrosserie il y a trois ans, influencée par un frère mécanicien et par son héritage familial "C'est mon frère qui me voyait plus dans la carrosserie, dans l'esthétique de la voiture", confie-t-elle, "J’ai toujours adoré l’automobile, c’est une passion familiale, c’est ma maman qui m’a transmis cet amour des voitures." Après un apprentissage de deux ans en carrosserie à Aucaleuc, elle a décidé de se spécialiser en soudure, "on m'a beaucoup dit dès le départ que j'étais douée dans certaines choses, surtout en soudure, et j'avais des lacunes en redressage”.
Cette année, elle participe à la Compétition des Métiers pour la deuxième fois. "La première fois, c'était vraiment une expérience à l'aveugle, mais très enrichissante", confie Marjolaine. Cette édition, elle est moins confiante. "vu que je suis allée vers une autre formation, ça fait six mois que je n'ai pas pratiqué de carrosserie, donc, forcément, j'ai perdu la main", regrette-t-elle.
En tant que femme dans un milieu majoritairement masculin, Marjolaine a dû développer une grande force de caractère. "Quand j'étais en carrosserie, pendant trois ans, j'ai été la seule fille, ce n’est pas toujours facile de s’adapter", raconte-t-elle. Pourtant, elle ne se laisse pas intimider. "Il faut avoir du caractère, il ne faut pas se laisser faire.", affirme-t-elle avec détermination. Son parcours témoigne d’un profond amour pour l’automobile et d’une volonté de prouver que le genre ne doit pas être un frein à l’ambition. "Il faut prouver ce qu'on vaut et qu'on est capable de le faire aussi. Donc, il ne faut pas hésiter à y aller." Son témoignage résonne comme un appel à toutes les jeunes femmes qui souhaiteraient se lancer dans des métiers techniques, souvent perçus comme masculins.
L’épreuve de Tôlerie Carrosserie de la Compétition des Métiers a été une occasion pour les jeunes talents de démontrer leur savoir-faire, mais aussi d’explorer les évolutions du métier dans un secteur automobile en pleine mutation. Entre innovations technologiques et tradition du travail manuel, les carrossiers de demain poursuivent leur route, toujours avec passion et détermination.
Le 31 janvier, l’équipe de Bretagne des Métiers a été annoncé. Parmi les 11 candidats, c’est Maelan qui a remporté la médaille d’or et qui représentera la Bretagne à Marseille lors des finales nationales. Il nous disait à l’issue de l’épreuve “Ça s'est bien passé, c'est une bonne expérience à faire. Il y a toujours des petites conneries qu'on peut faire mais j’ai pas rencontré de grosses difficultés.” On suivra son parcours de près et on lui souhaite à présent, de tout donner et de rentrer avec une médaille ! Bravo à lui et à tous les candidats.